Les gens qui tricotent sont des êtres paradoxaux
Suis-je plutôt une ourse solitaire ou une louve dépendante de la meute ? Je crois que le tricot permet aux gens comme moi, qui n’ont pas de réponse tranchée à cette question, de tirer beaucoup de joies de leur quotidien.
J’ai besoin d’énormément de temps seule; je travaille seule, dans le silence et le calme (truc de fille unique ?)
Au fil des ans j’ai échangé avec un certain nombre de tricoteurs et de tricoteuses farouches pour qui cette activité est un refuge, presque un rempart pour s’isoler quelques minutes ou plusieurs heures du monde (absolument dingue) dans lequel nous vivons. Le tricot est pour beaucoup d’entre nous un réel partenaire de vie. Quand je suis seule, le tricot est comme un doudou : si je suis énervée, je vais ressentir le besoin d’aligner quelques rangs de rage qui, comme une bonne respiration profonde, suffiront parfois à me calmer. Quand je suis détendue, je me laisse aller à tricoter un ouvrage à points ou motifs qui demande un peu de concentration. Je peux alors entrer dans un état proche de celui ressenti lors d’une méditation et si je suis lancée je n’entendrais même pas le téléphone sonner. Le tricot accompagne nos états d’âme.
Je vous rassure, je tricote aussi très souvent plus bêtement devant la tv en famille, je ne fais pas du tricot un cérémonial, loin de là.
Je ne suis par ailleurs pas une fanatique du tricot « en public ». Ce n’est absolument pas que je souhaite me cacher ou que j’aie honte de ma passion envahissante, c’est plutôt une volonté d’être entièrement à ce que je fais. Lors d’un diner, d’une conversation entre amis ou au spectacle, je trouve qu’il faut savoir lâcher le doudou et rendre ses 5 sens disponibles à ce (et ceux) qui nous entoure(nt).
Malgré cela, une très grande et précieuse partie de ma vie sociale est liée au tricot. Je chéris les soirées, après-midi et autres apéro tricots avec mes amies, tout comme j’essaie de multiplier les liens avec vous. À travers ce blog par exemple (rien ne me fait plus plaisir que de lire vos retours de mails et vos commentaires) et les différents Kal, Bacs Tricot et autres. Les cours de tricot, en vrai ou en visio, en groupe ou en tête à tête, sont également des moments privilégiés d’échange. J’ai pu, grâce au tricot et même je dois l’admettre (alors que cette plateforme me crée de plus en plus d’angoisses) grâce à Instagram nouer de belles relations et même de solides amitiés. J’aime aussi vous rencontrer sur des salons, c’est toujours agréable de mettre des corps et des visages sur des pseudos. Ça devrait être une partie majeure de mon activité mais je la néglige, j’essaie péniblement de tirer un peu de plaisir des réseaux sociaux. Je n’arrive pas à suivre le rythme des bonnes pratiques, je suis, en tant qu’utilisatrice, très gênée par la publicité et j’ai vraiment l’impression d’y être considérée comme un porte-monnaie sur pattes au mieux, comme un cerveau poubelle à gaver au pire. J’ai assez peur de l’empreinte que nous y laissons tous, et comme on croyait aux débuts de la photographie qu’à chaque fois qu’on nous tirait le portrait on nous enlevait un peu d’âme, j’ai depuis un moment la sensation qu’à chaque post ou like que je fais j’abandonne un peu plus de moi à un sale système. Ce ressenti s’est accentué depuis que j’ai plus de followers, je me demande toujours ce que je lâche et donne en pâture dès que je publie.
Je vais peut-être arrêter de vous livrer mes états d’âme pour aujourd’hui, je suis bavarde car figurez-vous que j’arrive de nouveau à tenir un stylo ! Du coup je gratte je gratte, dans mes cahiers, dans mon agenda, partout tout le temps. Ça me fait encore bien mal mais mécaniquement ça fonctionne, c’est un grand mieux. Je suis en train de préparer en parallèle un article sur la création de patrons, c’est un sujet qu’on m’a demandé d’aborder lors d’une précédente conversation.
Je vous montre quand même la lente avancée de mon pull rose Barbie, je ne sais pas si vous êtes allés voir le film, nous on a passé un super moment en famille. On a également vu Oppenheimer, autre ambiance mais quelques beaux jacquards à signaler du côté de la physique quantique !
Je maîtrise enfin la maille torse grâce au col ! Il y a donc du mieux après la vidéo postée la semaine passée. Je retourne à mon laborieux ouvrage, et je vous dis à très bientôt !